La sémiotique, la physique quantique, l’esthétique…et si l’esprit humain utilisait une taxinomie différente pour classer les grandes aires du savoir ?
Et si pour donner un peu d’air frais à ces carcans disciplinaires on décidait de réorganiser toutes les filières universitaires. Histoire de faire voyager nos problématiques asséchées d’avoir trop servi, nos dialectiques ridées et bien pensantes qui dorment depuis Hegel du sommeil dogmatique du juste… Juste un an, pour voir ! On pourrait étudier l’érologie. Il y aurait des cours sur l’histoire du sentiment amoureux à travers les âges, cela convoquerait évidemment l’histoire, la littérature, la philosophie mais aussi la biologie et les neurosciences pour comprendre les mécanismes biochimiques de la passion. Il faudrait sans doute rajouter l’éthologie pour connaître la façon dont se crée l’attachement chez les couples d’animaux. Sans compter les délicieux sujets de thèse que cela occasionnerait : “De Marivaux aux gender studies : approche de l’érologie sur la rémanence du travestissement et de l’ambiguïté dans le sentiment amoureux”, ou encore : “De la carte du tendre à la cartographie participative sur le web : introduction à la localisation des affects”. Et puis si on sortait des bibliothèques, si on annexait les laboratoires pour faire de l’érologie une science expérimentale ? Si on modélisait des molécules de l’engouement, si on les testait sur des volontaires, si on ressortait des placards les recettes médiévales des philtres d’amour, comment réagiraient les comités d’éthique devant tout ce bazar ?
Justement, dans le département voisin, la chaologie étudierait les modalités du bazar, les caractéristiques ontologiques du bordel et les limites de l’ordre maniaque… De la chambre en désordre du fils du voisin à la physique du chaos, de la permanence de la chaussette perdue dans le lave-linge à la mythologie grecque, les disciplines se croiseraient gentiment et les sujets de mémoires prêteraient à sourire : “De la systémie à la sérendipité : étude croisée de la disposition pseudo-aléatoire des couverts dans le lave-vaisselle”. La chaologie permettrait également de se spécialiser en hasardologie ou en maniaquologie et d’intégrer autant les statistiques que l’anthropologie. Les profs des différents UFR seraient obligés de se parler, on sortirait de nos clichés qui plombent l’image des sciences dures comme des sciences molles et les empêchent de communiquer sereinement.
Mais de toutes ces disciplines chimériques, si je ne devais en choisir qu’une seule, ce serait la moranologie, autrement dit l’étude de la bêtise. On y apprendrait à différencier l’ignorance de la maladresse, la volonté de mal faire de la naïveté. On comprendrait enfin de quoi est fait le terreau fertile de la connerie humaine. Les étudiants de licence plancheraient sur les partiels d’anthropologie ou de psychologie suivants : “Où finit la gentillesse, où commence la niaiserie ? Donnez un exemple précis de quelqu’un de votre entourage”, ou “Le gros lourd en boîte de nuit, abrutissement ontologique, inadaptation sociale ou sexisme avéré ?”. Pourquoi choisir le terme “moranologie” ? En hommage évident à l’ancienne députée sarkozyste, auteure du tristement célèbre aphorisme qui signifiait, en gros : “Je ne suis pas raciste, la preuve j’aime le couscous” et qui devînt l’emblème flamboyant du raccourci intellectuel le plus fantastiquement obtus de ce siècle. Le raccourci semble d’ailleurs si parfaitement inintelligent que les chercheurs se demandent actuellement comment résoudre la perfection conceptuelle du sophisme…ils décortiquent les prémisses, épluchent les inférences, mondent les ellipses, bref, j’ai bon espoir, en combinant de la sorte les disciplines universitaires, on serait bien capable d’écraser l’infâme, ou du moins, de l’agacer un peu.
Ouh con, pas compris la moitié des mots, mais, cette thèse, là, “De Marivaux aux gender studies : approche de l’érologie sur la rémanence du travestissement et de l’ambiguïté dans le sentiment amoureux”; je VEUX la lire!!!! Et oui, je suis assez pour foutre un coup de pied dans les universités où chacun se gargarise de sa propre science en se posant trop rarement la question de ce que fait son voisin chercheur. Vive l’érologie, la chaologie et la moranologie! Avec un peu de chances, dans quelques années, une université élevera une statue de toi belle en Damart, pour célébrer l’apparition de ces nouvelles filières! Ce jour là, on applaudira à tout rompre \o/
Oui je pense dailleurs que de fonder un département de damarologie s’impose ! Pourquoi ont-ils créé des motifs aussi moches ? A part les mamies et les gens en partance pour le Nunavut, qui achète ça ? Prendre la carte de fidélité, gain intéressant ou piège irrémédiable ?
Je penche sérieusement pour le piège irrémédiable; la honte sur toi si tes amis voient les catalogues envoyés à ton nom… Une sorte de plan machiavélique pour perdre toute vie sociale et devenir encore plus vite la petite vieille désagréable qui ne s’habille qu’en damart!
Ma Vava !!!
J’ai dû me retenir pour ne pas franchement rigoler en plein amphi en lisant ton article ! (eh oui, je suis de retour à Rennes pour un court temps)… C’est subtil, drôle, complètement fou voire franchement génial (si, si).
J’attends avec impatience la création de toutes ces nouvelles disciplines, notamment de la chaologie ! J’suis certaine de faire un sujet d’expérience intéressant pour les malheureux planchants sur las caractéristiques ontologiques du bordel.
Je me propose même de donner des cours en théorie du merdier appliquée…
Vivement la suite de ce blog qui s’annonce particulièrement Vavaesque !
@ Camilleuh : Oui, j’imagine que la damaritude exacerbée conduit systématiquement à la mamie grincheuse, hélas ! (c’est étonnant quand on sait à quel point la sensation des poussins est merveilleuse et incite à la méditation !)
@ Liette : En effet, je pense qu’un chercheur en chaologie donnerait des millions pour analyser ta chambre au laser-à-bordel ! Et pis comme ils disent dans “La science des rêves”, c’est compliqué et créatif de concevoir un ordre aléatoire !