Je poste ici mon recueil de haïkus expérimentaux, à mi-chemin entre le carnet de voyage et l’autobiographie. Fruit d’un travail d’écriture de huit ans, j’ai choisi la forme du haïku pour saisir d’infraordinaires moments. J’ai essayé de conserver la trace des images traditionnelles que le haïku japonais a l’habitude de traiter.
J’envisage à terme de les publier, toute proposition éditoriale est la bienvenue.
Bonne lecture
De l’enfance et des ogres
Fauteuil en cuir brun
Bien trop confortable
Il t’a englouti !
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Boucle du grand huit
Des cris. Des cheveux
Précèdent les rails
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Ont faim les chardons
Dévorent les mollets nus
Des enfants qui jouent
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Plantes sur la dune
Semblables à du foin. Broutées
Par le haut des vagues
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L’arbre pour l’enfant ?
Un prétexte à cabane
À tailler des flèches
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Déjà plus l’automne
Novembre est inutile
Noël est bien loin
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Chaude et protectrice
La voix de l’actrice
Répare les verres
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Les mamies d’antan
Enfournant le lourd pain blond
Et puis l’amour brut
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Guettant la porte
Ça fait plus mal que le deuil
Son chat disparu
La densité du temps scolaire
Fraîchement rasés
Les jeunes garçons aux joues
Ont quelques coupures/
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Partiel de philo
Calme. Dehors l’employé
Passe la tondeuse
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Elles boivent un déca
Chevelures innocentes
Les deux lycéennes
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Ces débris antiques
Amphores enfouies sous la mer
Comment les compter ?
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Toujours dessinée
La cicatrice au poignet
Lui reproche un peu
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Il croyait en l’art
À force il ne voit plus que
Du patrimoine
Les lieux sans âme
Dans l’arrière-cour
Pourquoi ces frigos cassés,
Chaussures trouées ?
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Toutes le même goût
Les confitures d’hôtels
Étrange hasard ?
L’hiver feutré
Bottes éclaboussées
Flaques de grêlons
Dans la nuit gercée
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Dimanche matin
L’éternité dans la neige
Attendra le bus
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Et les grands s’agitent
Autour des coussins soyeux
Le chat gris s’endort
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Elles font trois pas
Les étoiles d’Orion
Sur la nuit bleutée
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On voit au sommet
Les anneaux de Saturne
Sur les pics neigeux
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Jamais le Soleil
Ne cèdera à la Lune
Été islandais
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La Terre aplatie
Interdit la nuit d’été
Aux contrées du Nord
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L’amour c’est pour eux
Les vacances de l’âme
Légers pas dans l’herbe
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Ici le Soleil
Veille sur la nuit. L’enfant
N’a plus peur du noir
Haïkus du chemin
Cliché japonais
Cependant vous me touchez
Fleurs de cerisier
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Bruit sec de branches
Pour faire un bâton de marche
Oiseaux s’envolent
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Vaches placides
Dans la ferme à l’aurore
Cheval détale
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Douce sous mon dos
L’herbe grasse du printemps
Où part le soleil ?
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Eclair de chaton roux
Roule autour du cerisier
S’endort en boule
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Elle voit le monde
Avec un regard nouveau
Ils disent handicap
Le Soleil au sud
L’épave rouillée
Terrain de jeu en silence
Légers poissons bleus
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Il gâche la vue
L’arbre de la terrasse
Sans cacher l’été
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Les poulpes sèchent
Et sur la corde à linge
L’apéro frémit
/
Un silence aigu
Vibre au fond du sac
Attend un texto
/
Sculpture en cheveux
Équilibre de forces
Chignon de l’actrice